Colette Bouriat / Portrait
Colette Bouriat n'est guère touchée par les discours humains, elle préfère observer les phénomènes naturels et le mouvement des gens. Elle étudie patiemment les gestes, la circulation des éléments, leurs vibrations, les forces qui régissent les évènements. Elle se sent proche de ce que peut dire Henri Laborit dans « Mon oncle d'Amérique », d'Alain Resnais.
Son premier choc en peinture est Gauguin : « J'aime la beauté naturelle de ses femmes polynésiennes et je retiens leur sérénité mêlée de robustesse. Les compositions et la palette de Gauguin s'inscrivent ici comme une évidence, il n'a pas cherché, il s'est investi : le climat tropical, la peau, l'odeur des fleurs, des fruits, existent instinctivement ».
Depuis toujours, Colette Bouriat aime plonger dans les grandes vagues et se laisser emporter par l'écume jusqu'au banc sableux. Elle ne veut pas choisir ses couleurs, elle veut qu'elles viennent à elle et naturellement, les gris, les beiges, les ocres, les teintes de pierres ou de sable, ou bien le rouge de certains vins, s'imposent. Elle n'a pas peur que les couleurs s'échappent du bord. Comme Hantaï ou Viallat, elle se sent proche du groupe Support-Surface, elle ne veut pas que l'on sente sa main, ni le travail : elle privilégie les états de grâce. Elle n'aime pas la théâtralité grandiloquente et lui préfère le théâtre pur et dénudé d'un Ionesco ou d'un Beckett. Elle aime le cinéma lent et esthétique comme « La Femme de sable » et ne peut oublier le « Gerry » de Gus Van Sant.
Colette Bouriat apprécie les oeuvres poétiques pour leur langage illuminé et voyant. Elle se retrouve dans la fulgurance de Rimbaud. Dans les années 80, elle s'attache à l'oeuvre de Rothko pour la qualité de ses transparences et de ses espaces, aux graffitis de Basquiat et la gestuelle de Tapiés. Aujourd'hui, c'est la « simplicité » de J. C. Blais, la fraîcheur d'Alechinsky, l'espace de Debré, les blancs exaltés par les noirs de Soulages, qui animent sa pensée. Colette Bouriat s'imprègne longtemps mentalement avant de peindre ses fonds où l'on retrouve équilibre et stabilité, mais elle trace ses lignes à toute allure pour bouleverser cet ordre et redonner vie et légèreté à la toile. Un vaste paradoxe où réfléchi et instinctif s'harmonisent.
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